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Face à la décision de l'administration: accepter, discuter, refuser.
Contester une transaction

2006 - Les vaches maigres : Ne vous laissez pas faire !

Sur ordre du ministère de l'intérieur, les préfectures proposent désormais (2006) aux propriétaires des indemnités réduites de 20 à 30 % sur ce qui leur est dû.
C'est le quotidien l'Humanité qui a révélé l'affaire le 15 mars 2006, suivi par le Monde le 25 mars 2006.

Qu'elles soient appelées " transaction ", " offre transactionnelle " ou " protocole transactionnel ", ces propositions d'indemnisation d'un nouveau genre sont inacceptables.

Inacceptables parce que l'Etat fait un abattement sur l'indemnité qui est due et qui est égale à la totalité des loyers et des charges restés impayés pendant la période de responsabilité de l'Etat, calculés sur la base du loyer initial indexé et des charges récupérables.
Pas un euro de plus, mais pas un euro de moins .
C'est ce que les tribunaux administratifs appellent les " justes loyers ".

Si la proposition que reçoit un propriétaire ne donne pas le détail des calculs, si elle est succincte, globale, si elle se contente de rappeler la période d'indemnisation, si elle utilise le mot " transaction " et si la somme offerte ne correspond pas aux calculs rappelés ci-dessus, alors c'est " une transaction 2006 ".

Inacceptables car ce n'est pas une vraie transaction au sens du code civil (articles 2044 et suivants). La transaction est un contrat, un accord qui comporte des concessions réciproques et pour les tribunaux, il n'y a pas transaction quand une des parties abandonne ses droits pour une contrepartie si faible qu'elle est pratiquement inexistante.

Qu'est-ce que l'Etat offre comme contrepartie pour compenser une réduction de 30 % ?
L'indemnité elle-même ? Mais la loi l'oblige à indemniser l'intégralité des préjudices !
Une proposition rapide ? Mais la loi donne deux mois à l'Etat pour faire une proposition !
Un paiement rapide si la transaction est acceptée ? Mais c'est la moindre des choses !
Une expulsion rapide ? ... Il ne faut pas y compter !

En réalité, il n'y a pas de contrepartie et les propriétaires sont totalement perdants. C'est le fait du prince, l'arbitraire, la loi du plus fort. Certes, l'administration est libre de proposer ce qu'elle veut comme indemnité, mais le propriétaire lésé n'est pas obligé d'accepter sans se défendre !

QUE FAIRE ?
Il y a bien le recours hiérarchique, mais le seul recours efficace à 100 % (et même au delà), c'est de saisir le tribunal administratif et de demander l'annulation de la transaction. Les propriétaires sont certains d'avoir gain de cause car les tribunaux administratifs n'ont aucune raison de changer leur façon du juger : les préjudices causés par le refus de concours doivent être intégralement réparés, s'ils sont correctement énumérés, chiffrés et justifiés .

Mais les petits propriétaires peuvent-ils saisir le tribunal administratif quand le coût indirect (frais d'avocat) d'un recours est supérieur au gain espéré ? Il faut compter en effet au moins 1.500 à 2.000 € de frais dont il faut faire l'avance. Et peuvent-ils attendre un à deux ans que le jugement soit rendu, avec la marge d'incertitude que tout jugement comporte ?

L'administration compte sur le découragement des particuliers.
Il ne faut pas se laisser faire !
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SOS PROPRIETAIRES vous propose un modèle de recours hiérarchique à adresser au ministre de l'intérieur et un modèle de requête à adresser au juge administratif.

QUAND ET COMMENT SAISIR LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF ?

1.les délais

pendant deux mois à compter de la date de notification par la Poste si la transaction a été adressée en recommandé avec accusé de réception
aucun délai si la transaction a été envoyée en lettre simple


2.comment

en déposant ou en adressant (personnellement ou par un avocat) un " mémoire " (une demande) au greffe du tribunal administratif du département du local occupé

3.le recours

il peut être sommaire (" ... je demande l'annulation de la décision d'indemnisation du XX.XX.2006 et la condamnation de l'Etat à me verser une somme de X €, et je compléterai ultérieurement ma demande par un mémoire détaillé ") et non signé par avocat, mais il devra être rapidement complété par un mémoire définitif et argumenté, rédigé ou non par un avocat, obligatoirement signé par un avocat

4.l'avocat

lorsqu'une somme d'argent est demandée au juge administratif (recours de plein contentieux), il ne jugera le litige que si le mémoire introductif d'instance est signé par un avocat (article R431-2 du code de justice administrative), même si ce n'est pas lui qui l'a rédigé. Evidemment, l'avis et les conseils d'un avocat sont toujours utiles et souhaitables.

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PETIT CATALOGUE D'ACTIONS A MENER POUR DEFENDRE SES INTERETS DES RECEPTION D'UNE OFFRE D'INDEMNITE TRANSACTIONNELLE

1. Vérifier qu'il y a bien eu abattement
L'administration doit verser au propriétaire les justes loyers calculés sur la base du loyer contractuel indexé sur l'indice insee du coût de la construction et les charges récupérables (il faut lui avoir fourni copie du bail et des relevés de charges). Pour les autres préjudices, voir les fiches SOS PROPRIETAIRES. Chaque propriétaire qui s'estime lésé par une transaction doit donc calculer lui-même les justes loyers pour déterminer l'abattement pratiqué par l'administration (15 %, 20 %, 30 %...) et protester en connaissance de cause.

2. Décider de sa stratégie
Le juge administratif prend toujours en compte les loyers indexés et les charges récupérables si les justificatifs lui ont été fournis.
Il alloue également une indemnité si on la lui demande au titre du trouble dans les conditions de jouissance du local occupé (de 500 à 1500 € voire plus selon la longueur de la période de responsabilité de l'Etat) et les frais irrépétibles (de 1.000 à 1.500 €). Il faut également demander que les sommes allouées au titre des loyers et des charges portent intérêts avec capitalisation (à compter de la date du recours amiable). Enfin il faut savoir que les indemnités allouées au titre du trouble de jouissance et les frais irrépétibles portent également intérêts, mais à compter du prononcé du jugement.

Le propriétaire qui saisit le juge administratif est certain d'obtenir les justes loyers. Mais il aura dû payer un avocat et débourser environ 1.500 €, et attendre de un à deux ans selon l'encombrement des tribunaux administratifs. Le juge lui allouera également les frais irrépétibles et une indemnité pour trouble de jouissance : pour quel montant ? On ne peut pas savoir à l'avance. Mais il y a des chances raisonnables pour que les indemnités allouées à titre annexe augmentées des intérêts légaux couvrent les frais d'avocat.

Donc, si les justes loyers (et peut être d'autres préjudices en plus) sont au moins équivalents aux honoraires d'avocat, si vous pouvez faire l'avance de ces frais et si vous êtes patients, saisissez le juge administratif.

3. Comment agir

Recours hiérarchique
Dès réception de la transaction, adresser (sans passer par un avocat) au ministre de l'intérieur et au préfet du département du local occupé un recours hiérarchique (voir modèle proposé par SOS PROPRIETAIRES)
En principe, le recours hiérarchique devrait être adressé au ministre de l'intérieur seul, mais pour des raisons de rapidité d'action, il est utile de l'adresser aux deux autorités. De toutes façons, il ne faut pas s'illusionner : le ministère de l'intérieur laissera au préfet le soin de donner suite au recours hiérarchique, sauf si l'enjeu financier fait peser sur les finances de l'Etat le risque d'une lourde condamnation par le juge administratif, auquel cas des instructions seront peut-être données au préfet.


Requête de précaution
S'il y a bien abattement par rapport aux justes loyers (et non par rapport à une demande extravagante du style 50.000 € de dommages-intérêts) et dès réception de la transaction, déposer ou adresser au greffe du tribunal administratif du département du local occupé une requête en indemnisation sommaire ou complète (voir modèle proposé par SOS.PROPRIETAIRES), à laquelle il faut joindre trois photocopies de la transaction. A ce stade de la procédure, cette requête n'a pas besoin d'être signée par un avocat. Le greffe du tribunal administratif enverra au préfet une copie de votre requête.

Requête définitive
Dans les quinze jours qui précèdent la fin du délai de deux mois qui suit la date à laquelle la transaction a été notifiée et si l'administration reste muette ou confirme son offre sans la modifier, faire signer la requête définitive par un avocat (par exemple du barreau de votre département) et l'envoyer avant la fin du délai de deux mois. Ou lui demander de rédiger la requête et de suivre le dossier jusqu'à l'exécution complète du jugement. De toutes façons, si la requête n'est pas au moins signée par un avocat, le juge la rejettera.

Si à la suite du recours hiérarchique, l'administration donne satisfaction au propriétaire, celui-ci (son avocat) devra abandonner son recours et se "désister de l'instance en cours", c'est à dire écrire au tribunal administratif pour lui dire qu'il abandonne son recours. Mais compte tenu des frais engagés, il peut tout aussi bien ne pas accepter la nouvelle proposition et attendre le jugement.

5. Autres démarches sans condition de délai
saisir une association de défense des propriétaires ou des consommateurs
informer les parlementaires locaux (député ou sénateur)
saisir le médiateur de la République (avec les mêmes arguments)
saisir la presse
 

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